Comment mettre son cheval sur la main … sans les mains ?
Quel que soit l’objectif et la relation que vous développez avec votre cheval, pour qu’il puisse vous porter sur son dos sans se faire mal, il est important qu’il soit « en main », et sans que celle-ci soit obtenue par une action directe des rênes pour forcer l’attitude. Sous ce titre un peu provocateur se cache pourtant une notion fondamentale dans le travail des chevaux, que ce soit pour le dressage, le CSO, le concours complet ou même la balade. Pierre Beaupère, cavalier professionnel, vous révèle les trois paramètres indispensables pour mettre son cheval sur la main !
Photo – Pierre Beaupère, ©Céline Brabant
La mise en main est une conséquence
C’est une idée vraiment primordiale : la mise en main du cheval est un résultat, une conséquence, mais pas une fin en soit !
La mise en main est le résultat de la combinaison de trois paramètres : le contrôle du rythme, le contrôle de l’équilibre et la décontraction mentale et physique.
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Bien sûr, il est possible d’obtenir la mise en main même si un de ces trois paramètres fait défaut. Par la force, un mors plus dur, les rênes allemandes et autres enrênements qui font souvent ressembler le cheval à un saucisson tant il est ficelé de partout. Mais la mise en main obtenue de cette manière, aussi jolie soit-elle, sera toujours, selon mon expérience, défectueuse. Le cheval aura le chanfrein derrière la verticale, il grincera des dents, ouvrira la bouche pour se dégager du mors, s’acculera, basculera l’encolure ou creusera malgré tout son dos.
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C’est le contrôle du rythme et de l’équilibre qui va permettre au cheval de se décontracter. En effet, si le cheval est en déséquilibre permanent (le cheval sur les épaules par exemple), il lui sera impossible de se décontracter (demandez-vous si vous étiez vraiment décontracté la dernière fois que vous avez trébuché !). De la même manière, il sera très difficile de garder votre souffle et de vous détendre si vous passez votre temps à courir très vite, puis très lentement, puis très vite à nouveau (ce qui correspond à un manque de contrôle du rythme).
Or, nous avons besoin que le cheval se décontracte mentalement et physiquement, car les tensions dans son corps vont provoquer des résistances contre les actions du cavalier. Gardez à l’esprit que si votre cheval vous résiste, il y a de très fortes chances que cela vienne du fait qu’il n’est pas décontracté.
Par contre, n’oubliez pas qu’avant de vous préoccuper de la décontraction, il faudra toujours vérifier si vous contrôlez le rythme et l’équilibre. Cela veut-il dire que le cheval doit se déplacer dans une allure régulière et ne pas être sur les épaules ?
Oui et non !
Effectivement, le contrôle du rythme implique que le cheval se déplace sans changer en permanence de vitesse. Mais il implique aussi une notion de pureté dans l’allure et d’énergie. En effet, si votre cheval se déplace avec régularité mais en boitant, vous comprendrez facilement que ce genre de rythme n’est pas très intéressant pour son travail ! Et s’il est régulier mais qu’il dort debout et n’avance pas, n’espérez pas obtenir un début de mise en main facilement ou vous amuser !
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De la même manière, le contrôle de l’équilibre est plus subtil qu’il peut sembler à la base. En effet, un cheval n’est pas forcément équilibré parce qu’il a du « poids derrière » ! Lorsqu’on parle de cheval en équilibre, je pense qu’il vaut mieux garder l’idée d’un cheval qui peut changer facilement son équilibre. Car si on tentera évidemment de ramener le poids du cheval « sur les épaules » vers l’arrière (on sait aujourd’hui que ces conceptions sont avant tout des sensations du cavaliers et que ce n’est pas tout à fait la réalité biomécanique), il faudra soulager les postérieurs du cheval qui charge trop son arrière main. C’est ce type de cheval qui souvent se contracte face au surcroît d’effort qu’il s’impose et qui en relevant la tête charge encore plus ses postérieurs…
Attention : l’équilibre n’est pas que l’équilibre avant/arrière. C’est aussi l’équilibre gauche/droite. Donc, comment le cheval répartit son poids sur ces quatre jambes.
En observant les chevaux en fonction de ces trois paramètres, on réalise qu’il est possible d’analyser plus de 90% des problèmes de mise en main, mais aussi des problèmes de communication des cavaliers avec leur monture. Ces paramètres permettent d’avoir beaucoup plus facilement une vision vraiment claire de ce qu’il faut corriger et de mettre en place des moyens d’action simples et efficaces pour améliorer l’harmonie de la relation entre le cavalier et son cheval.
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L’auteur de cet article, Pierre Beaupère, est un cavalier professionnel et professeur de dressage, auteur du livre et des DVDs Equilibre et Rectitude. Il est d’autre part diplômé en éthologie équine de l’Université Libre de Bruxelles. Vous pouvez découvrir son travail et vous inscrire à sa newsletter en visitant son site internet : www.prbdressage.com.