3 choses à savoir pour muscler efficacement le dos de votre cheval
La musculation du dos est souvent un indicateur du bon travail d’un cheval. Je vais donc vous donner ici des pistes de compréhension et des exercices pour que votre cheval ait un dos en béton !
Je tiens d’ailleurs à remercier le Dr Isabelle Burgaud de m’avoir épaulée dans la rédaction de cet article.
Table des matières
D’abord, c’est quoi un joli dos pour un cheval ?
Un joli dos, c’est un dos qui n’est pas “en cuvette”, donc qui n’est pas creux, donc qui est plutôt droit (lapalissade bonjour !). Autrement dit la concavité thoracique est réduite. Et c’est aussi un dos musclé, donc dont les muscles sont toniques mais pas figés.
La question que tout le monde se pose c’est donc « Comment peut on obtenir un tel résultat ? »
La « position » du dos dépend de la « position » de l’encolure
Tout ça grâce au « ligament supra épineux ». Retenez bien ce nom.
En fait, le dos du cheval possède un système ligamentaire extrêmement bien fait. Il est composé du ligament nuchal (qui se prononce “nukal”) et du ligament supra-épineux.
Le ligament supra épineux relie les vertèbres entres elles par leur sommet (l’apophyse) depuis le sommet du sacrum jusqu’au garrot. Il se prolonge en un ligament nuchal qui va relier les vertèbres depuis le garrot (donc les premières vertèbres thoraciques) jusqu’aux premières cervicales en faisant une forme d’éventail.
Le ligament nuchal comporte deux parties :
- la corde, qui relie le garrot au sommet du crâne (la corde se trouve juste sous la crinière en fait)
- la lame qui part du garrot et qui rejoint le corps de toutes les vertèbres cervicales
La conséquence de la présence de ces ligaments, c’est que quand le cheval baisse la tête, ça remonte mécaniquement et passivement l’intégralité du dos.
💡 Vous pouvez d’ailleurs le « mesurer » vous même. Posez un stick ou une baguette de bois en équilibre entre le garrot et la croupe de votre cheval. Gardez lui la tête en l’air et mesurez l’espace entre le point le plus bas et le stick. Répétez l’opération avec le cheval tête en bas. Vous verrez que la distance se sera largement amenuisée. Le dos du cheval a été remonté.
Donc quand le cheval a la tête vers le bas, ça forme un pont. C’est ce pont qui permet de porter le cavalier en laissant les muscles de la chaîne dorsale travailler librement.
➡️ Ce qu’il faut retenir ici c’est que donc l’attitude de devant, va influer la capacité du cheval à mobiliser son dos et donc à le muscler. Une attitude basse et ronde étant donc à privilégier.
Pour se renforcer, le dos doit d’abord être décontracté
Les muscles du dos ne sont pas fait pour porter le cavalier. Le système ligamentaire s’en charge. Les muscles du dos interviennent dans les allures et dans l’incurvation (entre autres et pour faire simple). Mais pour ça, ils doivent être souples et décontractés pour travailler correctement.
“Les muscles du dos ne sont pas fait pour porter le cavalier”
Donc s’ils sont figés pour porter ou amortir les mouvements du cavaliers ou parce la selle leur fait mal, la locomotion ne sera pas belle. C’est ça qu’il se passe quand on voit les chevaux avec la tête haute, le dos creux, et les postérieurs qui ne sont pas engagés.
📚 En savoir plus : Quels critères regarder pour bien choisir sa selle ?
Détaillons un peu les chaînes musculaires
D’un point de vue musculaire, il est important de parler des deux chaînes musculaires : la chaîne dorsale et la chaîne ventrale.
La chaine dorsale
Les muscles de la chaîne dorsale (ou “ligne du dessus”) sont, en gros, les muscles qui sont au dessus des vertèbres. Ce sont les muscles cervicaux dorsaux (muscles profonds qui composent la partie supérieure de l’encolure), les muscles de la masse commune ou « erector spinae » qui sont au niveau du dos, et les muscles fessiers et fémoraux caudaux qui permettent de reculer les postérieurs.
Tous ces muscles sont des extenseurs du tronc et de la hanche. Leur contraction permet de relever l’encolure et de reculer les postérieurs donc de “creuser le dos”. Vous devez commencer à comprendre : cette chaîne est prépondérante chez les chevaux mal travaillés.
La chaine ventrale
La chaîne ventrale quant à elle comporte les muscles cervicaux ventraux (les muscles du bas de l’encolure qui permettent de la fléchir), les muscles abdominaux et les muscles fémoraux craniaux. Ceux-ci permettent de ramener les postérieurs sous le cheval.
Tous ces muscles sont donc des fléchisseurs de l’encolure, du tronc et de la hanche. Ils font donc descendre l’encolure. Parce que oui, ce qu’on appelle une “extension d’encolure” correspond en fait à une flexion cervicale basse… Leur contraction permet donc d’abaisser l’encolure, de ramener les postérieurs et donc de remonter le dos. Cette chaîne est prépondérante chez les chevaux bien travaillés !
Maintenant qu’on connaît tout ça, le reste devient très simple.
Pour muscler le dos de son cheval, il faut donc d’abord muscler ses abdominaux
Vous l’avez compris, quand il y a contraction des abdominaux il y a fléchissement de la hanche. Il y donc ramener des postérieurs “sous la masse”. Avec ça, le fléchissement de la hanche va entraîner la mise en tension du système ligamentaire dorsal. Ainsi, le pont va se créer pour « porter » le cavalier. Ce pont va permettre aux muscles de la chaîne dorsale de travailler librement et donc de se renforcer dans la décontraction.
À l’inverse, quand les abdominaux ne sont pas sollicités, le bassin et les postérieurs ne vont pas être fléchis. Du coup le pont ligamentaire ne va pas être mis en place. Ce sont alors les muscles du dos qui vont être sollicités. Ils vont se figer et la locomotion va en être détériorée.
Pas d’abdos, pas de dos !!!
➡️ Il faut donc retenir que le renforcement de la ligne du dessus ne doit venir qu’après tonification de la ligne du dessous. Retenez également que la décontraction de la chaîne dorsale est indispensable à la mise en jeu de la chaîne ventrale. Les deux chaînes doivent travailler ensemble.
En effet, ce sont des groupes antagonistes. Ils créent des effets opposés. Les deux chaînes peuvent tout de même agir ensemble pour équilibrer la locomotion. Quand elles sont bien tonifiées toutes les deux et que leur travail s’équilibre bien, on en arrive … au rassembler !
La masse commune venant remonter la base de l’encolure, les abdos venant faire engager et fléchir les postérieurs, le dos bien tonique et remonté … Mais tout ça ne s’obtient qu’après de longues heures de travail.
D’ailleurs, qu’est ce que je peux travailler pour renforcer les abdominaux de mon cheval ?
Quelques exercices pour travailler les abdominaux
Voyons 3 petits exercices utiles pour le renforcement abdominal, puisque vous l’avez compris, pas de renforcement du dos sans renforcement des abdos.
📚 Plus d’exercices : 4 exercices de musculation sur le plat et sans barres au sol
Exercice #1 – La descente d’encolure
Eh oui, c’est tout simple mais la descente d’encolure est un très bon exercice pour la musculation des abdos.
Le Professeur Jean-Marie Denoix l’explique très bien :
“La mise sous tension du ligament supra épineux limite la flexion thoraco lombaire et accroît le travail des muscles abdominaux pour assurer l’engagement”
(Denoix, 2014)
Traduisons. En gros, en baissant la tête, le ligament supra épineux se tend, le dos se remonte. Jusque là tout est OK. Mais, le truc c’est que ça va venir “tirer les postérieurs en arrière” (cf figure 2). Du coup, en cherchant à faire engager les postérieurs, vous augmenterez le travail des abdominaux qui s’en trouveront nettement renforcés !
Ce travail est encore plus intensif si vous le faites dans une montée !
Exercice #2 – Le reculer
Le travail du reculer a beaucoup de vertu, notamment le fait que ça soit un travail lent et que ça travaille la coordination.
Le reculer va permettre un travail intense du muscle psoas-iliaque (ou ilio-psoas). Ce muscle relie les parties inférieures des vertèbres lombaires et l’ilium avec le haut du fémur. Il fait partie des muscles abdominaux (région sous-lombaire).
“C’est le muscle de l’engagement des postérieurs par excellence”
(Denoix, 2014)
Le principe de l’inversion de point fixe
Dans le reculer, l’ilio-psoas va travailler en inversion de point fixe. Et c’est ça tout l’intérêt. Je vous explique :
Quand le cheval se déplace vers l’avant, le point fixe de l’ilio-psoas ce sont les vertèbres et l’ilium (le bassin). Il va tirer le postérieur vers l’avant. Quand le cheval recule, c’est l’inverse ! Le point fixe devient le fémur, et le muscle va tirer le corps du cheval vers l’arrière, ce qui est nettement plus difficile.
Pour vous imager cet exercice, imaginez vous couché sur le ventre au bout de votre lit, les bras qui pendent dans le vide et mimez le mouvement des pompes avec vos mains. Trop facile ! Très grossièrement, dans ce cas le point fixe c’est votre corps et le point mobile ce sont vos bras. Maintenant, faites vraiment des pompes. Là ça devient un peu moins facile… parce que vous avez inversé le point fixe (vos mains) et le point mobile (votre corps). Le reculer c’est un peu le même principe en fait.
Exercice #3 – Les sauts de puce
Les sauts de puce sont très bons pour faire travailler les abdominaux grâce aux flexions-extensions très rapides et rapprochées.
En effet, à la réception du premier obstacle, les antérieurs se posent puis vont décoller directement pour entamer le franchissement du second obstacle. Ensuite les postérieurs vont se poser pour tout de suite faire leur appel du second obstacle. Il y a donc une phase où les antérieurs sont déjà en train d’aller sauter alors que les postérieurs ne se sont pas encore réceptionnés du premier saut. Cette phase de suspension est plus ou moins longue selon la vitesse à laquelle on rentre dans le dispositif, mais surtout la flexion du dos donc la contraction des abdos est énorme lors de cette phase.
Si vous combinez les sauts de puce en montée, alors là c’est le “six pack” assuré pour votre cheval.
Je sens d’ores et déjà qu’après la publication de cet article, Equisense Motion S va recenser une augmentation incroyable du nombre de sauts de puce 😊
Et maintenant quand vous verrez un cheval avec un gros bidon vous ne direz plus “il est duveteux”, vous direz “il n’a pas assez d’abdos, allons travailler les sauts de puce en montée pour que son dos s’en trouve renforcé !”.
📚 A lire aussi : Comment programmer l’entrainement de son cheval sur une saison entière
A très vite pour un prochain article
Camille Saute,
Co-fondatrice d’Equisense et responsable R&D.
Bibliographie
Denoix J.M., Approche de la kinésithérapie du cheval. 2ème édition. Maloine, Paris, 1997, 291 p.
Denoix J.M., Biomécanique et gymnastique du cheval, Vigot, Paris, 2014, 189 p.
Prach A., Etude de la musculature du rachis du cheval par mesures échographiques, Thèse vétérinaire, école vétérinaire de Lyon, 2011.