Les 8 choses à savoir sur l’emphysème chez le cheval
Votre cheval tousse régulièrement et le sirop peine à faire effet ? Et si c’était un peu plus qu’une simple toux, mais bien un début d’emphysème ? On vous explique ici ce que c’est et comment gérer un cheval emphysémateux.
Pour certains chevaux, la saison froide est synonyme de toux emphysémateuse. Quelle est cette maladie qui revient tous les ans avec mauvais jours ? Et que faire pour améliorer le confort d’un cheval malade ? Par ici, on vous aide à mieux comprendre la maladie et on vous donne les 8 choses à savoir pour améliorer la vie des chevaux emphysémateux !
Table des matières
- #1 – L’emphysème du cheval une maladie multifactorielle [1]
- #2 – L’environnement est le facteur clef de la maladie
- #3 – La toux est le principal symptôme, mais pas le seul
- #4 – C’est une maladie fréquente en hiver
- #5 – Il faut changer l’environnement du cheval pour le soulager 🌿🌾💨
- #6 – L’alimentation aussi doit être adaptée 🍎
- #7 – L’emphysème du cheval une maladie génétiquement transmissible
- #8 – Attention, c’est un vice rédhibitoire lors d’une vente !
#1 – L’emphysème du cheval une maladie multifactorielle [1]
Cette grande méchante maladie porte plusieurs noms : l’emphysème est le plus courant mais on l’appelle aussi la pousse, l’asthme équin, la RAO (=Recurrent Airway Obstruction) ou l’ORVR (Obstruction Récurrente des Voies Respiratoires) en français.
C’est en fait une maladie inflammatoire qui se caractérise par une obstruction des voies respiratoires profondes. Pour mémoire, les voies respiratoires supérieures correspondent à la portion de l’appareil respiratoire qui va des naseaux au larynx (la gorge). Les voies respiratoires profondes quant à elles correspondent à la portion qui va de la trachée aux poumons.
Cette pathologie se définit par le développement d’une réponse inflammatoire à cause de l’exposition à des poussières organiques (poussières qui proviennent d’animaux ou de végétaux). Ces poussières sont souvent issues du foin moisi et de la paille.
La cause de la maladie est multifactorielle. Les chercheurs s’accordent plus ou moins sur une origine allergique car les mécanismes de la maladie ressemblent à l’asthme des humains.
Cependant, les facteurs liés à l’environnement du cheval semblent jouer un rôle important. On ne connaît pas encore la totalité des mécanismes qui déclenchent une crise même si ces aspects ont été longuement étudiés.
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#2 – L’environnement est le facteur clef de la maladie
C’est l’exposition aux poussières de l’écurie qui déclenche les symptômes. Toutefois, on ne sait pas aujourd’hui en quoi chaque composant de la poussière joue un rôle particulier.
Par ailleurs, il a été démontré que chez les chevaux vivant au box, leurs voies respiratoires sont moins acides que la normale à cause de l’exposition à l’ammoniac (contenu dans les urines de la litière) [3]. Il a été démontré que l’exposition à l’ammoniac et les dérèglement du pH occasionnés seraient associés au développement de l’asthme chez l’homme. Les auteurs de cette étude pensent que cela pourrait être pareil chez le cheval. Pour autant, cela n’a pas encore été démontré.
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#3 – La toux est le principal symptôme, mais pas le seul
Les particules poussiéreuses de foin ou de paille contiennent tout un tas d’acariens, de bactéries ou de champignons. La poussière d’écurie contient plus de 50 espèces de moisissures ! Et oui …Beurk ! [1].
Chez le cheval hypersensible (allergique), la réaction immunitaire va être excessive. Lorsqu’il inhale la poussière, son système immunitaire s’emballe et libère des molécules inflammatoires de manière exagérée pour combattre “l’agresseur”.
L’inflammation provoque de nombreux symptômes
L’inflammation des voies respiratoires profondes provoque mécaniquement une toux (au repos et/ou à l’exercice). Mais ce n’est pas le seul symptôme car on observe aussi les réactions suivantes à cause de l’inflammation :
- la contraction des bronches. Ces “tuyaux” qui transportent l’air jusqu’aux poumons se rétrécissent en diamètre.
- l’augmentation de la production de mucus qui peut former des bouchons
- un remodelage des voies respiratoires profondes : une hypertrophie des muscles bronchiques, des zones de fibrose etc.
L’air se retrouve alors piégé dans les poumons et le cheval a du mal à respirer et surtout à expirer. On le voit faire des efforts. Il augmente l’amplitude de ses mouvements thoraciques et pousse en abdominal pour favoriser la respiration difficile. Aussi, il dilate anormalement ses naseaux : on appelle ça le tirage nasal.
A cause des violentes variations de pression abdominale synchrone à la respiration, on peut observer des flatulences 🌹. Je sais, ce n’est pas très glamour. On appelle ça le tirage anal. Evidemment, les difficultés respiratoires peuvent occasionner une intolérance à l’exercice.
Il existe bien entendu une grande variabilité des signes cliniques en fonction de la sévérité de la maladie. Lorsqu’on est à un stade avancé et qu’on n’arrive pas à stabiliser les symptômes, on finit par observer une “ligne de pousse”. Ça correspond à une hypertrophie des muscles obliques externes de l’abdomen à cause des efforts respiratoire (le cheval se muscle malgré lui). On peut également observer un amaigrissement parfois spectaculaire lorsque la maladie est devenue chronique.
#4 – C’est une maladie fréquente en hiver
Il s’agit plutôt d’une maladie de l’hémisphère nord, et plus particulièrement des zones tempérées. En effet, le climat de nos régions oblige les propriétaires à garder leurs chevaux dans des boxes et à les nourrir avec des fourrages.
C’est pourquoi il s’agit d’une maladie saisonnière récurrente, plus fréquemment observée en hiver. En plus, la vie en zones péri-urbaines à urbaines de certains chevaux les expose plus particulièrement à la pollution atmosphérique. Celle-ci pourrait jouer un rôle dans la sensibilisation des chevaux emphysémateux (comme cela a pu être démontré pour l’asthme humain).
En 2007, une large étude épidémiologique [2] a cherché à étudier la fréquence de la pousse en Grande-Bretagne. Ils sont arrivés à 14%. En consultation vétérinaire, la pousse peut représenter plus de 50% des consultations pour des problèmes respiratoires [1]. Vous voyez qu’il s’agit pas d’une maladie rare !
Notez que l’emphysème semble affecter uniquement les chevaux adultes et notamment les chevaux de plus de 7 ans. Donc il n’est pas garanti qu’un jeune cheval à priori sain ne développe pas la maladie par la suite.
#5 – Il faut changer l’environnement du cheval pour le soulager 🌿🌾💨
Le pré, passage obligatoire !
On ne peut pas guérir complètement le cheval atteint mais on peut le stabiliser. La réduction de l’exposition aux poussières de l’environnement est la clé de la réussite à long terme du traitement des chevaux souffrant d’emphysème. La meilleure solution consiste à mettre le cheval au pré toute l’année, ce qui permet en général une disparition des signes cliniques.
Exit la paille, bonjour les copeaux
Si c’est impossible, il faut essayer au maximum de réduire l’exposition du cheval à la poussière en le mettant par exemple dans un box aéré et éloigné de la réserve de paille. Sachez par exemple que la poussière organique est 35 fois plus élevée chez les chevaux gardés sur une litière de paille et nourris avec du foin que chez les chevaux gardés sur une litière de copeaux de bois et nourris avec des pellets (gros granulés de foin dépoussiéré) [4].
Vous pouvez donc remplacer la litière paille par des copeaux. Toutefois, retenez qu’une paille de très bonne qualité contient peu de poussière et ne provoque pas plus d’inflammation chez les chevaux malades que des copeaux classiques. Mais ce genre de paille est assez difficile à trouver. Veillez à ce que la litière soit toujours propre pour limiter les émanations d’ammoniac qui pourraient (même si ce n’est pas démontré) favoriser l’apparition des symptômes.
Bannissez la soufflette
Enfin, une autre étape essentielle est de soustraire au maximum votre cheval à toute activité engendrant de la poussière dans l’écurie. Prenons comme exemple la distribution de fourrages ou le nettoyage de l’écurie. Le passage de la soufflette juste sous le nez de votre cheval est particulièrement CATASTROPHIQUE. L’arrosage du sol avant le nettoyage peut aider à diminuer les poussières dans l’écurie.
Evidemment, tout ceci est plus facile à dire qu’à faire ! Il peut s’avérer compliqué de demander à un gérant d’écurie de gérer sa logistique en fonction de votre cheval emphysémateux.
#6 – L’alimentation aussi doit être adaptée 🍎
Puisque la poussière déclenche la crise allergique, il est évident que l’alimentation (poussiéreuse par définition) est un facteur de risque. En plus, les chevaux ont l’habitude de secouer le foin avec leur nez lorsqu’ils mangent ! Ce qui propulse une multitude de particules dans l’air. Bien sûr, ça n’arrange rien à la situation. Les composants allergènes sont plus nombreux dans le foin et la paille qui ont été mal préparés ou mal conservés. Pour diminuer, les risques, il faut donc avoir accès à des produits de qualité.
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Il existe des solutions alternatives au foin
Vous pouvez également remplacer les fourrages par de la luzerne (cubes), des granulés de foin, du foin hydroponique, de l’ensilage d’herbe (foin enrubanné) ou encore de l’herbe fraîche.
Si vous êtes obligé d’utiliser du foin, vous pouvez le tremper avant de le distribuer pour réduire la quantité de poussières présentes. La durée de trempage du foin fait l’objet de controverses et vous trouverez des durées allant de 20 minutes à 4 heures en fonction des études. Retenez qu’en-dessous de 20 minutes, c’est inefficace et qu’au-dessus, c’est efficace mais que cela diminue la valeur nutritive du foin et favorise le développement des bactéries et moisissures. 20-30 minutes semble donc être un bon compromis.
Il existe également désormais des solutions qui permettent de stériliser le foin, ce qui permet d’éliminer beaucoup plus de bactéries que le trempage, tout en conservant les qualités nutritionnelles du foin. Ces solutions sont coûteuses mais très efficaces.
Le mode de distribution du foin semble aussi avoir son importance. S’il est donné à terre, les poussières sont moins susceptibles de remonter l’appareil respiratoire car le cheval a la tête en bas. Si en revanche, on le met en hauteur dans un filet à foin ou un râtelier, cela favorise l’inhalation de la poussière. En effet, le cheval est contraint de garder la tête en hauteur. Préférez donc la solution foin par terre !
#7 – L’emphysème du cheval une maladie génétiquement transmissible
La sensibilité individuelle est évidente puisque la plupart des chevaux sont exposés quotidiennement à de fortes concentrations de poussières dans les écuries alors qu’une faible part d’entre eux développe des signes d’emphysème.
Mais dans ce cas, il ne s’agit de modifications d’un seul gène mais probablement de plusieurs. De plus, l’emphysème implique une interaction complexe entre le génome de l’individu et son environnement. Un cheval emphysémateux aura donc des chances d’avoir une descendance présentant des symptômes mais la relation est plus complexe que cela.
#8 – Attention, c’est un vice rédhibitoire lors d’une vente !
L’emphysème est considéré comme un vice rédhibitoire car il peut s’avérer très handicapant pour l’exploitation sportive de l’animal. C’est à dire que l’acheteur peut prétendre l’annulation de la vente ou au remboursement d’une partie du prix du cheval [5]. Il lui faut par contre agir dans les dix jours qui suivent la livraison du cheval (article R213-5 du Code Rural). Dans ce délai, il est conseillé de faire appel à un avocat qui saisira le Tribunal d’instance pour demander la nomination d’un expert.
Il est malheureusement très difficile de diagnostiquer la maladie lors de la visite d’achat, surtout si elle est faite en été ou si le cheval a moins de 7 ans.
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De cet article, retenez surtout qu’il est important de trouver l’environnement qui permette à votre cheval de rester en-dessous du seuil de déclenchement des symptômes. Ce seuil est individuel, il vous faudra donc bien connaître votre équidé. Lorsque la crise d’emphysème commence n’hésitez pas à appeler votre vétérinaire traitant afin qu’il puisse mettre en place un traitement médical.”
A bientôt pour un prochain article.
Marine Slove, vétérinaire et directrice produit
Travaux cités
[1] M. Denys, « Physiopathologie de l’obstruction récurrente des voies respiratoires chez le cheval : étude bibliographique et actualités », Thèse pour le doctorat vétérinaire, ENVT, 2011.
[2] HOTCHKISS et al., (2007) A survey of horse owners in Great Britain regarding horses in their care. Part 1 : Horse demographic characteristics and management, Equine Vet J 39 (4) : 294-300.
[3] WHITTAKER AG, LOVE S, PARKIN TDH et al, (2009) Stabling causes a significant increase in the pH of equine airway. Equine Vet J 41 (9) : 940-943.
[4] WOODS PS, ROBINSON NE, SWANSON MC et al, (1993) Airborne dust and aeroallergen concentration in a horse stable under two different management systems. Equine Vet J, 25 : 208-213.
[5] F. Grosbois, “La vente – Vices rédhibitoires”, Equipaedia 2014. [En ligne] Disponible sur : http://www.haras-nationaux.fr/information/accueil-equipaedia/reglementation/vente/vices-redhibitoires.html [Consulté le: 27-sept-2017].